Festival
Flamenco de la Villette 2012: un succès phénoménal !
Fort du succès qu'avait
remporté "La rue Flamenco", l'an dernier, un nouveau week-end
consacré au Flamenco s'est déroulé, cette année, à la grande
Halle de la Villette, à Paris. Cette
fois-ci, c'est Romero Diaz production qui a collaboré avec l'équipe de
la villette pour présenter au public, pendant trois soirées
consécutives, des spectacles avec les plus grands artistes
Flamencos de la scène actuelle. En effet, les grands
noms du Flamenco tels que José Maya, La Farruca, El Carpeta,
Diego Amador, La Moneta, Pastora Galvan et la compagnie
Antonio El Pipa ont exalté la magnificence du
Flamenco, tandis que la culture andalouse étaient présente
aussi au travers des stages, des animations musicales et
d'un village espagnol installé dans la grande Halle,
diffusant une ambiance chaleureuse et festive pendant toute
la durée de cet évènement. Retour sur ce week-end haut en
couleurs et plein d'émotions.
Le Flamenco a le vent en poupe...cela est devenu une
certitude, non seulement depuis que l'Unesco a choisi de le
désigner comme Patrimoine culturel immatériel de l'Humanité,
en 2010, mais aussi du fait que chaque évènement culturel de
qualité qui rassemble des artistes Flamencos rencontre un
succès phénoménal. Cela était le cas l'an dernier, avec "la
Rue Flamenco" alors qu'il n'y avait qu'un spectacle
programmé
pour chaque soirée. Cette année, les organisateurs ont mis
les bouchées doubles pour le plus grand bonheur du public.
En effet, en programmant deux spectacles durant trois
soirées consécutives sur la scène de la grande Halle de la
Villette, le festival a connu un record d'affluence puisque tous les spectacles se sont joués à guichet fermé!
José Maya ou la fulgurance du baile
gitano
En
ouverture du Festival, le beau et talentueux danseur gitan
José Maya a ébloui le public avec sa fougue et son
talent certain. Danseur attitré de Tomatito, il a été
formé par les plus grands maîtres de la célèbre école Amor
de Dios, à Madrid, et a collaboré avec les plus grands noms
du Flamenco. Il a travaillé aussi avec le cinéaste et
réalisateur Tony Gatlif dans le spectacle "Vertiges" en tant
que premier danseur et il prépare actuellement de son
prochain spectacle "Alegria". Nous l'avions vu à plusieurs
reprises sur la scène parisienne à Paris, notamment en 2009,
lors de la première partie de Diego el Cigala, au Casino de
Paris. C'est à ce moment là que le producteur Romero Diaz
l'avait remarqué et avait décidé de continuer à le produire
sur les scènes culturelles les plus prestigieuses. Los de
cette représentation, José a offert au public diverses
facettes de son talent. En effet, vêtu d'un costume mordoré
qui captait la lumière, il se jetait dans la danse dans un
seul élan, parcourait la scène comme un cheval fougueux et indomptable tout en maitrisant parfaitement le rythme, les
codes et la technique propres au Flamenco. Puis, changeant
de couleur de costume et privilégiant le noir, il dansait
sur des rythmes plus profonds. Parfois, il ralentissait
l'allure et, à l'écoute du chant de Juan José Amador, de
Juanarèz et de Rubio de Pruna il entrait dans son
intériorité, et le duende jaillissait de son regard, de
son corps, de son âme. Les guitares de Jesus de Rosario et de
Carlos de Jacoba prolongeaient cet état de grâce, appuyé par le
cajon de Lucky Losada. Rappelons pour les
nombreux aficionados que José Maya s'est installé à
Paris pour satisfaire la forte demande de ses élèves et
qu'il donne désormais des cours réguliers dans la capitale.
(+
Infos)
Danser divinement se conjugue a
tous les temps dans la dynastie Farruco
La deuxième partie de la soirée mettait la dynastie gitane
des Farruco à l'honneur avec la danseuse La
Farruca et son fils Manuel Fernández Montoya dit
El Carpeta,
le
petit dernier d'à peine douze ans, mais qui possède déjà une
technique phénoménale et qui, selon sa mère, aurait déjà
dépassé celle de ses frères...qui ne sont autres que les
grands Farruquito et Farru. Lors de ce
spectacle, La Farruca et El Carpeta firent une
démonstration de flamenco des plus intenses et des plus
purs. La Farruca, Rosario Montoya Manzano de
son nom d'état civile, est la fille du légendaire Farruco.
Elle s'inscrit dans une famille de danseurs Flamencos les
plus renommés à l'échelle internationale. Elle commence à
danser à 13 ans accompagnée au chant par le légendaire
Camaron de la Isla. Sa carrière artistique sera jalonnée
de succès retentissants notamment avec sa participation dans
le spectacle "Farruquito y familia" où elle reçoit
les éloges du public et des critiques. Accompagnée par les
chanteurs Pedro Heredia "El Granaino", Fabiola
Perez et Mara Rey, par les guitaristes Juan
Requena et Justo Heredia "El Toto" et par Octavio
Montoya aux percussions, La Farruca a envouté une
nouvelle fois le public avec sa danse dont le style très
gitan a séduit d'emblée. La Farruca, c'est le
Flamenco à l'état pur. Sensuelle et féminine, elle
représente l'essence même du Flamenco. Avec sa virtuosité
alliée à une allure et prestance époustouflantes, elle a
impressionné le public. Sa danse perpétue le style de son
grand-père Farruco, patriarche qui a crée son école
et qui a transmis son art à ses descendants. Pendant cette
représentation, La Farruca a laissé un belle place à El Carpeta
qui a investit la scène avec beaucoup d'assurance et
d'élégance. El Carpeta s'inscrit dans la lignée d'artistes
qui constitue la dynastie Farruco; sa
maturité et son génie précoces nous ont vraiment émerveillés
et prouvent que ce danseur est un phénomène hors du commun,
voire un génie. Le spectacle fut éblouissant, malgré quelques
soucis de sonorisation qui ont privé la chanteuse Mara
Rey de son micro, à la fin du spectacle.
Avec Diego Amador, le piano est
Flamenco
La première partie de la soirée musicale du
vendredi 4 mai était consacrée au pianiste Diego Amador,
musicien que nous avions eu le plaisir de voir
sur la scène
des Folies Bergères, à Paris, en octobre 2010, dans un
mano a mano avec le guitariste de jazz manouche
Bireli Lagrène.
Multi-instrumentiste autodidacte virtuose et
compositeur, Diego Amador est chanteur, guitariste,
percussionniste et pianiste. Avec le temps, le piano a pris
une place privilégiée dans sa carrière artistique, jusqu'à
devenir son moyen d'expression favori, rénovant ainsi le
Flamenco en intégrant cet instrument dans ce style musical.
Ce beau musicien sévillan provient de la dynastie gitane des
Amador, famille ancrée dans la tradition Flamenca.
Dans les années 80, c'est avec ses frères ainés Raimundo
et Rafael qu'ils ouvrirent le Flamenco à d'autres
cultures en y introduisant des influences diverses comme la
musique pop et rock au travers leur groupe mythique Pata
Negra. Fort de cette expérience , Diego Amador ne
cesse d'innover et de créer des nouvelles sonorités avec le
piano tout en restant profondément Flamenco car, pour lui,
c’est une question d’identité, au-delà de l’esthétique, une
affaire de gitans, une affaire de famille. Lors de ce
spectacle, Diego a interprété les thèmes de plusieurs
albums, "Piano Jondo", "El aire de lo puro" et "Rio de
los Canasteros", accompagné par son fils Diego Amador
Blanco, aux cajon, par le percussionniste
Israel Jesse Varela et par l'excellent chanteur José
Julian Heredia Martinez. Faisant la part belle à
l'improvisation, chacun a pris sa place dans ce quatuor
survolté, tandis que Diego prenait parfois le micro
pour chanter et, de son cante profondément gitan, il
émanait une douceur exquise. Quand il s'est levé pour pincer
et percuter les cordes de son piano à queue, ce fut tout un
monde de sonorités étranges et merveilleuses qu'il offrit au
public conquis et manifestement très ému par le talent de ce
musicien qui prépare un nouvel album dont la sortie serait
prévue au mois d'octobre prochain.
Le baile envoutant de la gitane
andalouse Fuensanta La Moneta
Pour deuxième partie de la soirée,
la grande danseuse granadine Fuensanta La Moneta a
présenté sa nouvelle création intitulée "Extremo Jondo",
entourée par le talentueux chanteur Miguel Lavi, par
le guitariste Luis Mariano et par les palmas
et les percussions d' El Cheyenne. Ce fut une heure
trente d'émotions fortes car la danse de La Moneta
nous hypnotise par sa vivacité, sa fantaisie et virtuosité
technique alliée à un sens inné de l'improvisation. Son
expressivité envoute et foudroie le public. Il faut
dire que cette artiste gitane andalouse à vocation précoce.
Elle débute sa carrière professionnelle à 13 ans et danse à
« La Rocio », une grotte légendaire du quartier
gitan de Sacromonte, à
Grenade, où se sont
produits des grandes figures
du baile telles que Juan Andrés Maya ou Manolete.
Plus tard, elle se forme auprès de maîtres tels que
Javier Latorre, Mario Maya, Juan Andrés Maya, Juana
Amaya, Matilde Coral et Israel Galván.
Etoile au firmament, Fuensanta est régulièrement
plébiscité par la critique et, tout au long de sa carrière,
elle a reçu de nombreuses récompenses. Lors de ce spectacle,
elle a exprimé toute la jondura du Flamenco,
alternant les palos et investissant tout l'espace de
la scène avec ses chorégraphies originales et sa force
dramatique d'une puissance exceptionnelle. Cette quatrième
création, Fuensanta a voulu l'immortaliser dans un
DVD éponyme qui permet au public de prolonger, autant qu'il
souhaite, ces moments de duende qui méritent aussi
d'être vus à plusieurs reprises en live.
Pastora Galván:
une danseuse au firmament
Le lendemain, le public a savouré
pleinement son
rendez-vous avec Pastora Galván,
l'une des
plus grandes figures du baile Flamenco actuel.
Fille de
José Galvan et
sœur d'Israel Galvan,
Pastora
représente la nouvelle génération de danseuses Flamencos en
droite lignée de la tradition Flamenco de son père mais très
ancrée aussi dans la modernité et influencée, sans doute,
par l'audace et le génie d'Israel Galvan.
Ces influences, elle les reconnait, elle s'en nourrit, mais
elle sait aussi s'en détacher pour inventer son style propre
fait de sensualité, de fougue et de vivacité. Son
talent a été reconnu très tôt dans sa carrière artistique et
elle a
travaillé avec de nombreux artistes de renom tels qu’Eva Yerbabuena,
Fernando Terremoto, Maria Pagès, Joaquim Grilo,
Jose Luis Rodriguez et le pianiste David Dorantes.
Pastora débute la représentation vêtue à la manière des
femmes du quartier de Triana, rendant ainsi un hommage à la
Triana pura, à l'époque où, dans ce quartier de Séville, le
Flamenco était partout et où les femmes de tout âge
dansaient dans la rue et dans les tablaos. Accompagnée par
les chanteurs José Valencia et Cristian Guerrero,
par le guitariste
Ramón Amador et par l'illustre Boboté aux palmas,
Pastora a dansé por Buleria, puis, ce fut au
rythme d'une Mariana
qu'elle
éblouit le public avec son
baile modelé par sa forte personnalité et sa technique
irréprochable. S'en est suivi une Solea de Triana
merveilleusement interprétée José Valencia, excellent
cantaor originaire de Lebrija, artiste dont
l'actualité est marquée par la sortie de son premier album
intitulé "Solo Flamenco". Nous y reviendrons
ultérieurement... au rythme d'un Pregon puis d' une
Seguiriya, José Valencia et Cristian Guerrero
chantèrent avec talent puis ils accompagnèrent la danse de
Pastora qui poursuivit avec une Alegria, le
palo le plus festif du Flamenco, tandis que Bobote
captait aussi l'attention du public avec ses palmas,
sa joie communicative et sa personnalité hors du commun. Le
spectacle qui se termina por Tarantos et Tangos
fut suivi d'une standing ovation de la part du public.
Antonio El Pipa : élégance
et impétuosité
Clôturant la programmation du Festival, le
danseur Antonio El Pipa et sa compagnie investirent
la scène de la grande Halle de la Villette, offrant un
spectacle de danse gitane pure et authentique. Petit-fils de
la danseuse et chanteuse Juana La Del Pipa, Antonio
el Pipa est originaire de Jerez. On ne compte plus les
festivals de danse qui l’ont accueilli, dans le monde
entier. Lauréat de prix prestigieux comme celui du Cercle
des Beaux-arts de Madrid, de la critique au meilleur
spectacle, de la Chaise d’Étude flamenco, la critique l’a
encensé comme le "digne successeur des vétérans Antonio
Gadès, Mario May ou le "Güito". Avec sa
compagnie, il transmet avec talent toute la force et la
beauté du Flamenco de ses racines.
Il émane d’Antonio
El Pipa une élégance rare. Son port altier et sa danse
très masculine contrastent avec rondeur des braceos
des danseuses qui l'accompagnent. Au beau milieu du
spectacle, Antonio se dresse puis se cabre comme un
cheval fougueux et, quand il se lance dans un zapateado
magistral, le ciel et la terre tremblent et semblent lui
implorer sa rémission. Alors, après avoir parcouru tout
l'espace scénique, il ralentit le pas et, dans un geste
impétueux, accorde un répit aux éléments naturels qu'un
simple geste de sa part remettrait en mouvement. Quel
charisme et quelle belle arrogance! le corps de Ballet est
constitué d'une danseuse, Claudia Vázquez,
et de cinq danseurs: Juan Jose Alba, Manuel
Soto, Guillermo Campos, Jeronimo Bellido et
Luis Bermudez. Il
accompagne
merveilleusement les chorégraphies du maestro et
parfois, un duo avec Claudia Vázquez
vient agrémenter le spectacle, tandis que la chanteuse
Mara Rey livre tout son talent, appuyée par les
mélodies et les accords de guitare de
Juan José Alba
et de Fco. Javier Ibáñez. Envouté par le spectacle,
le public a longuement acclamé les artistes lors de la
fin de fiesta qui fut aussi le bouquet final du Festival.
Nous remercions l'équipe organisatrice et
plus particulièrement Nicole et Romero, de
Romero Diaz Productions ainsi que les
artistes qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes durant ces
trois soirées chargées d'émotions et de duende.
Notons aussi le franc succès qu'ont rencontré les
stages de danse de Maria Donzella de l'association
Atika Flamenco ainsi que l'implication des aficionados
et des artistes professionnels qui n'hésitaient pas à
prolonger la fête après le spectacle, dans le hall d'accueil où l'ambiance conviviale
reflétait merveilleusement la notion de partage inhérente au
Flamenco.
Photos de l'ambiance autour du Festival: